Quelle est la différence entre un psychiatre, un psychologue, un psychanalyste, un psychothérapeute ? Comment et sur quels critères dois-je choisir mon « psy » ?
Ces questions sont fréquentes et ô combien légitimes ! Elles induisent généralement des réponses floues, parfois contradictoires, souvent techniques, sans consensus évident et qui pérennisent parfois le sentiment d’incompréhension…
Les éléments de réponse suivants n’engagent que leur auteur. Ils traduisent un avis personnel, même si, aussi global que possible, sur la situation actuelle de la « psychothérapie » française. Ils s’étayent de références, ouvrages et textes que vous trouverez en liens utiles.
Dr David ESFANDI
Le psychiatre est un médecin qui s’est spécialisé en psychiatrie, durant un internat de 4 ans; ce, après un tronc commun d’études médicales de 6 ans.
Il est habilité à poser un diagnostic, à poser l’indication de traitements et à prescrire des psychotropes.
Contrairement à une idée répandue, son statut de médecin ne préjuge en rien de son éventuelle orientation psychothérapique, ni même d’une réelle aptitude vis-à-vis d’une quelconque approche en la matière. Il existe ainsi des "psychiatres-psychanalystes", "psychiatres-comportementalistes", "psychiatres-systémiciens" (...), et des "psychiatres… tout court". Rien n’oblige en effet, durant ses études, un médecin-psychiatre à se former à l’exercice d’une approche psychothérapique. Le psychiatre aura, au mieux, été sensibilisé aux principaux courants psychothérapiques existants, par des enseignements théoriques dispensés par des universitaires. Il aura souvent été encouragé à suivre plus particulièrement le courant, privilégié et majoritaire, des services universitaires auxquels il est rattaché, durant son internat. Ainsi, si les universitaires bordelais ont tendance à promouvoir une orientation cognitive et comportementale, celle-ci n’est pas la règle, voire relève plutôt d’une exception sur le territoire français. En France, la psychanalyse reste probablement le courant psychothérapique prédominant. On estime qu’un étudiant en psychiatrie sur 4 songerait à suivre une psychanalyse, condition "sine qua non" à l’accès au titre de psychanalyste. Il faut donc noter qu’un psychiatre peut tout à fait exercer la psychiatrie sans aucune formation pratique à une approche psychothérapique spécifique. Dans ce cas de figure, son aptitude à accompagner, écouter et conseiller les patients semblerait se baser et tirer légitimité de son niveau d’études, et de son expertise médicale. C’est certainement cette "faculté", inhérente au Doctorat d’Études Spécialisées, que traduirait la terminologie, imprécise et sans signification univoque reconnue, de "psychothérapie de soutien". Bien que facteur de confusion, ce terme reste d’ailleurs largement employé dans la pratique clinique.
La récente réglementation du titre de psychothérapeute avait pour objectif affiché de protéger les patients d’une usurpation de statut par des individus, peu scrupuleux, cherchant à dissimuler des pratiques relevant de la pseudoscience derrière une honorabilité de façade. Tout un chacun pouvait, en effet, revendiquer l’exercice d’approches à visée thérapeutique, plus ou moins farfelues, sans fondement reconnu, mais avec une apparente respectabilité attribuée par excès au titre de psychothérapeute. Les nouvelles dispositions juridiques accordent pourtant une attribution d’office du titre de psychothérapeute à tous les psychiatres, sans aucune nécessité préalable de justifier d’une formation complémentaire en psychothérapie. Les psychiatres s’avéraient, dans un premier temps, être la seule corporation à bénéficier de cet étonnant "passe-droit" — largesse des instances décisionnaires par reconnaissance pour leurs 10 années d’études supérieures… Un avantage acquis attise inévitablement des convoitises..., surtout si son fondement est contestable. Il en est donc devenu finalement de même, pour les psychologues cliniciens, après bien des négociations tumultueuses et bien des pressions exercées de la part de leurs syndicats. Ces "positions de principe", dominées par une recherche de consensus, peuvent interroger sur leur pertinence et leur légitimité…
Le psychologue a suivi des études universitaires de psychologie. Au terme d’un master, il a acquis des connaissances psychopathologiques, issues de courants scientifiques, mais aussi traditionnels et historiques. En théorie, il devrait s’être autant familiarisé avec les hypothèses issues des sciences cognitives, des données neurobiologiques actuelles, des théories de l’apprentissage, qu’avec les hypothèses psychanalytiques pourtant souvent présentées comme seules à avoir valeur de vérité. Si on observe de près le contenu des modules d'enseignement intitulés "psychopathologie", on s’aperçoit que ce terme est bien souvent utilisé, de façon abusive, pour traduire l'étude uniciste des théories psychodynamiques Freudiennes et autres. Malgré bien des réticences, en France, les sciences cognitives et la neurobiologie sont pourtant également inscrites au programme des étudiants.
Durant leurs études, les psychologues ont appris à savoir manier les tests et échelles. Parmi eux co-existent des outils novateurs et performants, et d'autres, en voie de tomber en désuétude pour leur caractère non fondé, ni validé scientifiquement. Cette mise à jour, s’effectue péniblement, malgré les résistances des nostalgiques du "bon vieux temps" et les gardiens du dogme, qui s’évertuent à maintenir le champ de la santé mentale hors du champ du rationnel et de la preuve.
Comme pour les psychiatres, les psychologues ne sont donc pas formés véritablement à l’exercice de la psychothérapie quel qu’en soit le courant. Là encore, il existe tout au plus une sensibilisation aux principaux courants. Un grand nombre d'étudiants débute, ce qu’ils nomment, un "travail personnel" d’analyse (différents courants sont représentés en France, au travers des écoles Freudiennes, Lacaniennes, Youngiennes et autres…) Ces années d’introspection les conduiront, à terme, au statut abouti de psychanalyste. Là encore, la spécificité française est telle qu’une majorité (mais pas l’intégralité) des étudiants en psychologie s’oriente vers une approche analytique de la pratique psychothérapique. L’enseignement de la psychologie est tel, qu’aujourd’hui encore, beaucoup de jeunes bacheliers s’inscrivent dans ces études, en pensant la psychanalyse être un courant hégémonique, voire exclusif. Les psychologues ont désormais accès, sans restriction, au titre de psychothérapeute. Comme pour les psychiatres, il n’existe pourtant aucune assurance d’une formation pratique à l’exercice de la psychothérapie, et ce, quel qu’en soit le courant.
Le terme de psychanalyste s’applique à toute personne ayant suivi une psychanalyse quelle que soit sa formation initiale, et quelle que soit la nature ou l’orientation de l’analyse concernée… Il n’existe aucune protection du titre et encore moins de réglementation de l’exercice de psychanalyste. Il existe en effet de multiples écoles, plus ou moins reconnues. Elles sont catégorisées, entre autres, par le ou les psychanalystes dans la lignée de l’enseignement desquels elles se revendiquent (Freud, Lacan, Young, Klein, Adler…) La réglementation prévoit de reconnaître le titre de psychothérapeute aux membres de certaines de ces sociétés psychanalytiques sur des critères qui restent pour l’heure imprécis et l’objet de véritables "lobbyings" de courants parfois opposés… Sans entrer dans l’éternel questionnement sur les bénéfices tirés de la psychanalyse par les sujets analysés, il est à noter l’opposition farouche des courants analytiques au principe-même d’une évaluation des effets. Se refusant le plus souvent à se prévaloir d'un effet thérapeutique, la psychanalyse revendique donc un statut à part des autres psychothérapies. Philippe GRIMBERT déclarait alors : "la psychanalyse ne soigne pas, elle sauve…"… resterait à définir de quoi et qui ?… Évaluée, malgré elle, parmi 4 approches psychothérapiques par l’I.N.S.E.R.M en 2004, les résultats ne furent souvent pas en faveur de l’approche psychodynamique. Il paraissait cohérent d’inclure la psychanalyse au rapport (elle reste une des approches psychothérapiques majeures), malgré la volonté affichée de maintenir ce statut à part. Le rapport fut écarté par le Ministre de la Justice de l’époque, sous la pression des mouvements psychanalytiques, et derrière l’argument qu’on ne peut "mesurer la souffrance humaine". Selon ses détracteurs, le comité de rédaction ne comportait pas un nombre suffisant de représentants de la psychanalyse… et pour cause, puisque la plupart d’entre eux refusaient le principe même de l’évaluation…
Cette impossibilité, revendiquée et affichée comme vérité irréfutable, d’évaluer les effets des approches psychothérapiques, a contribué, depuis des années, à l’émergence de différents courants pseudo-scientifiques jusqu’aux plus farfelus.
Jusqu'à très récemment le terme de psychothérapeute n'était protégé par aucune législation et pouvait donc être revendiqué par tous. Un rapport I.N.S.E.R.M a tenté d'évaluer 4 grandes approches mais celui-ci a généré de vives tensions entre partisans des différentes approches. Les principaux courants psychothérapiques tels qu’ils sont le plus souvent reconnus par les professionnels de santé mentale recensent : la psychanalyse, les thérapies cognitives et comportementales, les thérapies systémiques, la thérapie interpersonnelle, la thérapie humaniste, la thérapie institutionnelle…
Devant autant de difficulté à obtenir des données pragmatiques et exploitables sur la pertinence des approches psychothérapiques, le vœu pieux de limiter le risque couru par des patients, qui s’orientent vers un thérapeute, a été formulé au travers d’une réglementation du titre de psychothérapeute. Si l’objectif affiché peut paraître celui de statuer sur l’aspect rationnel et efficient des différentes approches, il va sans dire qu’aucun décideur n’osera remettre en question l’accès du titre de psychothérapeute aux membres des grandes écoles psychanalytiques. Ce titre est par ailleurs offert aux psychiatres et psychologues, avec dispenses totales des heures de psychopathologie. Il l'est également, avec une dispense partielle, aux médecins (les chirurgiens orthopédistes apprécieront la prise en considération de leur talent inné de psychothérapeutes) et aux… psychanalystes (non psychiatre et non psychologue, s’entend…) Rappelons que le titre de psychanalyste n’est aucunement protégé et que l’exercice n’a jamais été réglementé. Il faudra donc certainement expliquer pourquoi, bio-psycho-généalogistes, thérapeutes du "cri primal", Gestalt-thérapeutes, thérapeute holistique, ou autres kinésiologues se verraient refuser l’accès au "Saint-titre" consacré, ou au moins à une dispense partielle de formation en psychopathologie: sur l’argument d’une absence de preuve en faveur d’un effet bénéfique spécifique de leur pratique sur la santé mentale ? sur l’argument de l’existence de "Masters de psychanalyse" dans les universités françaises ? Il serait donc légitime d'offrir l’accès au titre à tous les prétendants, une fois la création d’un master universitaires dans leurs pratiques respectives.
Il faut cependant reconnaître aux législateurs la recherche d’autres critères complémentaires essentiels, tels qu’avoir bénéficié d’une formation en psychopathologie validée selon certains critères, ou encore de pouvoir justifier d’un certain nombre d’heures de supervision… Ces éléments, légitimes et certainement pertinents, restent pourtant à préciser et harmoniser sur le plan européen, sinon international. Légiférer sur l’utilisation du titre de psychothérapeute découle du bon sens et sert un objectif louable. La lecture des textes de Loi et de leurs versions successives remaniées illustrent parfaitement la métaphore que sous-tend l’expression "usine à gaz"… Réforme du titre de psychothérapeute ? ... protection du titre… mais aucune réglementation de l’exercice. Ainsi, si cette réglementation pouvait, au mieux, protéger les usagers de certaines dérives potentiellement dangereuses, elle échouera inévitablement à refléter la réalité de l’habilité d’un "thérapeute psy", le niveau de preuve ni le fondement de l’efficacité supposée, de son intervention.
En pratique et en résumé, pour chercher un "thérapeute psychique" (puisque le terme de psychothérapeute va rapidement tendre à devenir restrictif), il serait pertinent de choisir en premier lieu le courant psychothérapique qui vous sera apparu le mieux correspondre à vos attentes et avoir fait preuve de ses résultats. Il vous appartiendra alors de vous assurer que le thérapeute trouvé a suivi une formation reconnue par les instances officielles qui régissent ladite thérapie. Il est légitime de chercher à connaître la formation initiale du thérapeute (psychiatre, psychologue, assistant social, infirmier, voire, ingénieur en aéronautique ou artisan boulanger…) Plus celle-ci vous apparaît éloignée d’une pratique en lien à la santé, plus il paraît pertinent de s’informer des formations complémentaires accomplies par le thérapeute pour asseoir ses connaissances en santé mentale. N’oubliez pas que, malheureusement, certains honorables médecins défrayent la chronique par des positions dogmatiques sectaires dangereuses, pendant que des infirmiers exercent régulièrement en service hospitalier, des approches psychothérapeutiques pointues et efficaces. Le choix d’un thérapeute dépend ensuite, et seulement ensuite, de critères qui échappent au rationnel : il s’agit de la rencontre de 2 individus qui vont chercher à établir une relation thérapeutique de qualité — préalable nécessaire à tout travail psychothérapique.
Le trouble bipolaire de l’humeur constitue la nouvelle appellation de ce qui était jusqu’alors nommé psychose maniaco-dépressive (P.M.D) ou plutôt, maladie maniaco-dépressive (le terme de psychose s’étant avéré impropre pour diverses raisons). Sa prévalence en France est évaluée à 1 % de la population et toucherait autant d’hommes que de femmes. {Rouillon, 2009}
On peut en principe poser le diagnostic par la mise en évidence d’un épisode de manie caractérisée, même unique, durant la vie d’une personne (trouble bipolaire type 1), ou par l’association d’un antécédent de dépression et d’au moins un épisode d’hypomanie durant la vie entière (bipolarité de type 2). D’autres sous types ont été décrits par des auteurs sans faire l’unanimité sur la pertinence de leur classification.
Si le trouble bipolaire type 1 est souvent aisé à diagnostiquer, il existe donc des formes atténuées dont la confirmation est parfois plus délicate. C’est le « sur-diagnostic » des ces sous-catégories qui est plus souvent sujet à controverse et raillé par certains.
Le diagnostic de bipolarité constitue pourtant un véritable enjeu en terme de santé publique pour différentes raisons. Beaucoup de diagnostics de schizophrénie ont probablement été portés à tort, par le passé, sur la simple mise en évidence d’un état délirant aigu. Il est pourtant précisé par le D.S.M que le délire doit pourtant s’y manifester en dehors d’une perturbation patente de l’humeur. Un état dépressif (ou maniaque) peut en effet être associé à des caractéristiques psychotiques, sans pour autant entrer dans les critères des troubles psychotiques. Le traitement de la bipolarité repose alors sur des régulateurs d’humeur qui offrent souvent des perspectives de tolérance et de pronostic (évolution attendue) plus favorables que pour les traitements de la schizophrénie.
De plus, écarter une bipolarité devrait être une des préoccupations premières du primo-prescripteur d’antidépresseurs. Les antidépresseurs administrés par excès à des personnes présentant une bipolarité ignorée peuvent conduire à un effet thérapeutique imparfait, à des variations rapides de l’humeur, voire à une aggravation véritable de l’état clinique du patient (virage de l’humeur).
Pour mesurer le rôle de l’industrie pharmaceutique dans l’essor récent des diagnostics de trouble bipolaire de l’humeur, il est nécessaire de rappeler que le Lithium reste, pour beaucoup de spécialistes, la molécule de référence. Très ancien, ce traitement ne constitue pourtant pas un enjeu économique quelconque pour les laboratoires privés. Il semblerait qu’un processus inverse à celui suspecté se soit en fait produit : développement d’un intérêt majeur de l’industrie pour un diagnostic ré émergent (car jusqu’alors ignoré), pour lequel des recherches approfondies ont été menées sur les nouvelles spécialités pharmacologiques, dans le but de mettre en évidence un effet régulateur d’humeur (et donc une indication) à ces dernières.
Pour éviter le "sur diagnostic" gênant, mais aussi (et peut-être surtout) le "sous diagnostic" condamnable de trouble bipolaire de l’humeur, il est possible de faire appel à un avis spécialisé complémentaire, si les éléments symptomatiques paraissent litigieux à votre psychiatre, auprès du Centre Expert Bipolarité de l’hôpital Charles Perrens.
Comme pour les autres spécialités médicales, le niveau de remboursement par votre complémentaire mutuelle est indiqué en pourcentage du tarif opposable de la sécurité sociale. Votre organisme de couverture sociale assure en effet 70 % de ce tarif, auquel viendra s'ajouter l'intervention de votre complémentaire à hauteur de 100%, 125%, 150%, voire 200 % ou plus... Quand vous bénéficiez d'une affection longue durée (A.L.D), votre organisme d'assurance maladie assure le paiement de 100 % du tarif opposable de la sécurité sociale. Les dépassements d'honoraires ne sont, en revanche, pas concernés par cette couverture et restent à votre charge. Si vous bénéficiez de la couverture médicale universelle (C.M.U), le dépassement d'honoraires de votre praticien ne s'applique pas, même s'il exerce en secteur conventionné avec honoraires libres (secteur 2).
Toute personne de moins de 26 ans peut aller consulter le psychiatre de son choix, sans être préalablement orientée par son médecin généraliste. Au-delà de cet âge, depuis la règlementation instaurant la nécessité de déclarer un médecin traitant à l'organisme de santé de rattachement, une orientation préalable est nécessaire, pour pouvoir prétendre à un remboursement de façon optimale. En pratique, une relation de confiance avec votre médecin traitant devrait vous permettre d'évoquer le sujet avec lui aisément, voire de bénéficier de ses conseils et de son orientation vers un praticien susceptible de convenir à votre demande.
Aucune étude, à notre connaissance, ne confirme l'idée selon laquelle il faut qu'une thérapie coûte au patient pour être bénéfique. Les éventuelles données en cette faveur peuvent, tout au plus, traduire un biais méthodologique de sélection (le fait de payer les consultations sélectionnant les personnes les plus motivées...) Ce qui importe est donc l'implication du patient dans la thérapie et non la somme qu'il débourse pour ses soins. Le thérapeute peut considérer que son intervention et son habilité justifie d'un coût, sans avoir à se dissimuler derrière l'argument fallacieux d'un "préalable nécessaire à l'effet de la thérapie".
Comme pour toute spécialité médicale (ou recours à un "prestataire" censé fournir une intervention à visée bénéfique), il paraît indéniable que le choix d'un "psy" reste une liberté totale et inaliénable du patient. Celui-ci doit également être averti de la légitimité de demander l'avis d'un autre professionnel, si le doute s'empare de lui, concernant l'orientation psychothérapique ou diagnostique prise par son thérapeute.